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LES DEUX VILLIERS.



Saint-Brieuc vient de fêter la mémoire d’un écrivain qui, en son vivant, la laissait totalement indifférente et qu’elle revendique aujourd’hui avec fracas : Villiers de l’Isle-Adam. Entre une ode de Théodore Botrel et une cantate de M. Colin, des bouches aussi éloquentes que radicales ont célébré ce parfait réactionnaire.

Il y a toujours eu de l’ironie dans la vie de Villiers de l’Isle-Adam et il convenait qu’il y en eût jusque dans sa glorification posthume. C’est une ville charmante que Saint-Brieuc, en dépit de son sobriquet. Pourquoi l’a-t-on surnommée Saint-Brieuc-les-Choux et non, par exemple, Saint-Brieuc-les-Bains ou les Caleçons ?[1] Sans doute la plage est loin de la ville. Celle-ci est bâtie sur une éminence granitique dominant l’abrupte vallée du Gouet. Mais, de ce grand balcon de cent mètres de haut, l’œil enveloppe un admirable horizon de mer, les falaises lointaines de Paimpol, le rude Fréhel et cette tour prochaine de Cesson, vieux burg démantelé, mais toujours solide, qui signale aux navires l’entrée du port et dont le nom ressemble à un impératif. C’en est un. Vous savez qu’en Bretagne la Vierge, certains jours, vient rendre visite à ses féaux. Au cours d’une de ces tournées mystérieuses, où l’ac-

  1. Il y a un Saint-Brieuc-les-Ifs dans un département voisin.