Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/221

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

maticale. Celle de M. Jaffrennou est purement littéraire et biographique ; elle intéresse aussi plus directement les Bretons qui ne connaissaient, jusqu’ici, Prosper Proux que par ses vers et ignoraient à peu près tout de sa vie. Lacune d’autant plus regrettable que, s’il y a un poète en Bretagne qui mérite le nom de national, c’est bien celui-ci. Il n’y a pas de barde qui soit plus populaire là-bas. Cependant Proux est mort le 11 mai 1873. Quand, au bout de quarante ans, la mémoire d’un écrivain est encore aussi vivante qu’au premier jour chez ses compatriotes, c’est que cet écrivain était bien l’expression de sa race et que sa race continue à se retrouver en lui, sinon tout entière, au moins dans son essentiel. Tel paraît bien être le cas de l’auteur de Bombard Kerné (La Bombarde de Cornouaille), recueil de poésies publié en 1866 et qui fait date dans l’histoire de la Renaissance celtique. Peu de livres furent reçus avec un applaudissement plus général.

« M. Proux est un poète d’une originalité très accentuée, d’une verve primesautière et endiablée, écrivait Luzel. Son vers franc, bien venu, né du sol, est tout imprégné du parfum des landes et des champs de Breiz-Izel ». La Villemarqué se montrait encore plus enthousiaste et n’hésitait pas à préférer Prosper Proux à Brizeux — le Brizeux des poésies en langue bretonne.

Contentons-nous de ces attestations qui émanent des deux représentants les plus autorisés du bardisme armoricain. Mais le public n’avait pas attendu, pour adopter Prosper Proux, cette manière d’investiture officielle et, bien avant qu’elles eussent été recueillies en volume, telles de ses élégies sur feuilles volantes, comme le Kimiad eur zoudard iaouank (Adieux d’un jeune soldat), chantaient sur les lèvres