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LE MONUMENT
DE NARCISSE QUELLIEN[1]


À Madame Dussane.


La Bretagne fut bien inspirée d’honorer d’une stèle et d’un médaillon le barde Narcisse Quellien : ce fut un poète charmant, qui la chanta sur tous les tons, qui ne connut qu’elle, n’aima qu’elle et, pour n’avoir point à souffrir d’atteinte dans l’affection qu’il lui portait, se tint prudemment à distance et ne bougea pas de Paris.

Le fait est qu’on le connaissait beaucoup plus sur le boulevard qu’à Tréguier ou à Landerneau. Le Dîner celtique, qu’il avait fondé dans un restaurant de la rive gauche, était une des « curiosités » de la capitale et figurait au programme de la tournée des grands-ducs entre la visite aux assommoirs de la

  1. V. dans la 1re  Série de l’Âme bretonne l’article : Le barde du Dîner Celtique. Sur l’initiative de François Menez, La Roche-Derrien, patrie de Quellien, venait de lui dédier un médaillon dû au ciseau inspiré de Paul Le Goff, un des espoirs de la sculpture bretonne d’avant la guerre. L’œuvre a beaucoup de charme : la fine tête du barde, encadrée de chêne, qui est l’arbre celtique par excellence, se détache sur le fond rose d’un menhir en pierre de Ploumanac’h. Un an plus tard, Paul Le Goff, entre temps lauréat de la Bourse de Voyage, tombait sur les champs de bataille des Flandres (1914) ; le second fils du barde, Allain Quellien, élève de l’École coloniale, était fauché à son tour en 1915. L’aîné Georges Quellien, sous-préfet dans les régions envahies, puis co-directeur, avec Gémier, de la Comédie des Champs-Elysées, est mort cette année même (1923).