Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/236

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comme cela rend facile l’exécution de ses devoirs de soldat.

Fortes paroles, prononcées de ce ton si simple dont ne se départait jamais Le Gonidec ! Elles me rappelaient le mot de l’Anabase : « Ceux qui craignent le plus les dieux sont ceux qui, dans la mêlée, craignent le moins les hommes. » Il faudrait ajouter pour Le Gonidec : « Ceux qui craignent le moins les hommes sont ceux qui font le moins étalage de leur bravoure. » Qui se fût douté, à voir ce vieillard si doux, si effacé, si modeste, qu’il était un des héros de l’Année Terrible et qu’il avait vingt fois gagné, par des prodiges de vaillance, le petit bout de ruban rouge qui fleurissait imperceptiblement sa boutonnière ?

À Loigny, quand Sonis, désespéré par la débandade du 51e régiment de marche, se retournait vers Charette et lui criait : « Il y a des lâches, là-bas. Suivez-moi et mourons ensemble », Le Gonidec avait été un des premiers à se mettre aux ordres du commandant du 17e corps. Ce jour-là, dans la plaine blanche et glacée, sous le vol strident des obus, je ne sais si les zouaves pontificaux eurent le loisir d’entendre la sainte messe et de communier : ils durent se contenter de recevoir à genoux et en bloc la bénédiction de leur aumônier et, partis 300 pour reprendre Loigny, cédé par la brigade Bourdillon, ils revinrent 60, n’ayant pu enlever que la ferme de Villours, mais ayant donné au 37e, qui tenait stoïquement dans le cimetière, le temps de briller ses dernières cartouches et au reste du corps de Chanzy le temps de se dégager : Sonis avait la cuisse broyée ; Bouillé, son chef d’état-major, Charette étaient grièvement blessés. Le Gonidec s’en tirait avec quelques égratignures. Patay même, le sanglant Patay,