Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/275

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Valet et de Garnier. Et c’est ce moment qu’un biologiste universellement réputé, un professeur de Sorbonne, dont la parole faisait autorité jusqu’ici chez les « intellectuels », va choisir pour dire à ses collègues ébaubis ;

— Mais non, vous vous trompez ! La science sans majuscule et tout court, — la seule que je connaisse — n’enseigne rien de ce que vous prétendez. Et elle enseigne même précisément le contraire. Il fallait être un Jean-Jacques pour croire que l’homme, à l’état sauvage, n’a que des vertus et que l’égoïsme est une déviation de notre nature primitive. Avec cet « utopiste », vous voyez dans le droit une notion métaphysique et sacrée. Biologiste, je n’y distingue rien de tel. Et je vois très bien en revanche les raisons très fortes et purement positives, essentiellement égoïstes, qui ont poussé l’homme à fonder les syndicats de garantie et d’assistance qu’on appelle des sociétés. Je vais plus loin et j’estime que la grande majorité de nos semblables, voire les plus malheureux, les plus déshérités, souhaitent obscurément la continuation d’un régime social qui leur est devenu indispensable par l’effet d’habitudes plusieurs fois millénaires. En sorte que, d’un commun accord, on doit, me semble-t-il, imiter l’éducation des siècles passés et développer chez les jeunes hommes le sentiment du devoir plutôt que la conscience de droits qu’ils n’ont que trop de tendance à s’exagérer…

Ainsi parle, ou à peu près, Le Dantec, et vous concevez aisément le trouble et même l’indignation qu’un pareil langage devait provoquer dans certains milieux. Cette indignation n’a pas été ressentie qu’en Sorbonne : elle s’est propagée jusqu’aux extrémités du corps enseignant, et de pauvres cerveaux de pri-