Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/305

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des Cognets ne l’a pas plus inventé que le reste. Et le fait est que nous connaissions depuis longtemps les deux faces de cette Bretagne déconcertante, si rude et si douce tout à la fois ; mais peut-être qu’aucun écrivain breton n’avait su comme lui, dans une langue plus nuancée, en même temps que plus pleine, exprimer et fondre en une seule ces deux images contradictoires de la plus hégélienne des races.

Le seul défaut d’un tel livre (je parle pour le critique) est qu’il échappe à toute analyse. Ce sont bien les mêmes personnages qui circulent d’un bout à l’autre du recueil et burinés d’un trait si sûr qu’ils s’incrustent dans la mémoire et n’en bougent plus désormais : tels l’« innocent » Fanch-ar-Lac’h, le vieux marquis de Maugouar, le trimardeur Diberrès, ce type par excellence du déraciné breton, l’évangélique M. Le Minous, le tonitruant abbé Talabourdon ou ces archanges foudroyés, l’abbé Chuidic et le clerc Mandez, engagé « à Islande » pour la moitié du prix d’un homme ; mais ces personnages accomplissent une action différente dans chacun des sept récits qui composent le volume et l’on ne peut songer à résumer ces sept récits.

Tous les sept sont à lire et à retenir. S’il me fallait cependant indiquer une préférence et faire un choix dans ce captivant heptaméron, c’est le Droit du Seigneur que j’élirais, l’histoire de la douce et passive Lizaïc Malzenn, séduite par un affreux tyranneau de village nommé Bondiou, grosse de ses œuvres, abandonnée, jetée au ruisseau et qui pousse l’esprit de mansuétude jusqu’à faire saluer le gredin par son petit : « Dis : bonjour. Monsieur le maire ! » Et le récit aurait pu finir là. Et ce n’eût été que du Maupassant — du Maupassant supérieur. Chez des Cognets, il se pour-