Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/376

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corinthien, ses niches à coquilles, les élégantes cariatides de son fronton, vous diriez un palais, — et c’est la maison de la Mort. Ah ! que nous sommes loin des imaginations moroses du rationalisme et de l’obscur boyau où les morts de M. Bartholomé s’engagent avec une si compréhensible répugnance ! C’est par des arcs de triomphe que nos morts à nous entrent dans le repos éternel ».

Ces beaux signes des pensées les plus mystérieuses de votre nation, il paraît qu’on les déplace, qu’on les détruit. Vous m’appelez à l’aide ; je voudrais y courir utilement. Je me rappelle le temps où nous avions vingt ans, mon cher ami, et ce bel été inoubliable de notre jeunesse où vous me guidiez sur les chemins de votre sublime Bretagne. Nous allions à pied par monts et par vaux. Un jour vous me faisiez entrer chez M. Renan, à Rosmaphamon, où nous écoutions quelques instants le vieux magicien, et, le lendemain, nous passions l’après-midi à sommeiller et rêver dans le Creisker de Saint-Pol-de-Léon. Trente années ont recouvert d’ombre ces heureuses journées, mais nous sommes restés fidèles aux sentiments qu’elles formaient en nous. La leçon du vieux clocher, nous l’entendons toujours et, en défendant les églises, les calvaires et les cimetières contre la haine abjecte ou la morne indifférence, nous sommes d’accord avec le vrai Renan, de qui nous sommes allés interrompre les songeries bretonnes ; nous recueillons ce qu’il y a de plus vivant et de noble dans ce fils des Celtes chez qui sommeillait, légèrement voilé par les poussières de la vie, le sens du divin et que dégoûteraient profondément les grossiers iconoclastes et les ennemis de l’Esprit. Mais comment puis-je répondre à votre désir, mon cher Le Goffic, et servir vos cimetières en danger ?