Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/385

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ou mieux encore dans une clairière de l’antique forêt de Paimpont, elle fît un effet considérable sur le public.

Mais la Druidesse de M. Schuré ne pose pas qu’un problème littéraire. L’auteur l’a fait précéder d’une étude sur le réveil de l’âme celtique qui est certainement une des pages les plus brillantes de cet écrivain nourri de Quinet, de Moreau de Jonès et de Jean Reynaud et qui prolonge jusqu’à nous la tradition des grands illuminés du romantisme.

Et croyez que ce regard de voyant qu’il porte sur l’avenir, ce verbe volontiers augural, ces airs de mystagogue, s’accommodent très bien à l’occasion, chez M. Schuré, avec un sens critique des plus déliés qui nous a valu ici même, sur Lucile et le Barzaz-Breiz, des remarques pleines de finesse, d’à propos et de goût. Dans un autre genre, à la fin de l’introduction, la centaine de lignes sur Ouessant, où l’auteur a ramassé toute la poésie éparse et comme flottante de la Thulé armoricaine, mériteraient de prendre place dans cette géographie pittoresque et morale des pays de France dont a parlé quelque part Jules Lemaître. Cela est d’un art tout classique, d’une netteté toute latine. Et le compliment choquera peut-être M. Schuré. Mais le moment est venu de marquer nos positions respectives et de lui dire jusqu’où je veux bien le suivre dans son mouvement de rénovation celtique et pourquoi, en conscience, il m’est impossible d’aller plus loin.

Les Français ou, du moins, la grande majorité des Français, sont des Celtes, c’est entendu ; et, quand la piété filiale ne nous en ferait pas un devoir, nous aurions tout intérêt à nous en souvenir. Suos quisque patimur manes : un certain déterminisme physiologique pèse sur les races comme sur les individus ; il