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dôme rubescent. Cependant, un peu avant le fort du Corbeau, près de Keralliou, à l’endroit où l’Elorn se perd dans la rade de Brest, la voici qui se hasarde, qui fait une première et timide apparition. C’est même sur le versant nord-ouest de la péninsule, dans l’exposition la moins favorable par conséquent, que sa culture a pris naissance[1].

La fraise s’appelle en breton sivien. Je ne sais exactement d’où vient ce mot. Fraise en latin se disait fraga. Or, presque tous les noms des légumes et des fruits, en Bretagne, ont une origine latine bien caractérisée. C’est que les Romains semblent avoir introduit en Gaule la culture maraîchère et

  1. « Ce fait, singulier en apparence, dit M. Camille Vallaux, s’explique par le voisinage immédiat de Brest, qui fut longtemps le seul débouché des produits de Plougastel. Le fraisier du Chili, qui s’est merveilleusement acclimaté dans le pays et dont la réussite a été le point d’origine de la culture intensive de la fraise, était donc cultivé aux environs de Keralliou. On s’aperçut, vers 1820, qu’il réussissait bien mieux sur les terrains de la côte sud à Larnouzel et à Kerdaniel, sur l’anse de l’Auberlac’h. Des falaises, jusqu’alors incultes, furent découpées en petits carrés séparés par des muretins de pierre sèche, les « talus » de la côte, dont l’utilité ici est incontestable ; elles furent ensemencées en fraisiers. De Kerdaniel, les fraisiers s’étendirent vers l’Auberlac’h, Saint-Adrien et Roségat. En 1865, ils arrivaient au Tinduff, sur la rivière de Daoulas. En 1877, ils parvenaient à Saint-Claude et envahissaient la commune de Loperc’het. Aujourd’hui ils ne s’arrêtent qu’au Squivit, tout près de Daoulas. Mais le grand centre de production est demeuré à l’Auberlac’h, où il s’établissait, il y a soixante-dix ans et où les fraises sont entourées de légumes-primeurs, laitues, choux précoces, haricots verts et petits pois. » (La Basse-Bretagne, Paris, 1907.)