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Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/147

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christ byzantin de Saint-Mathieu de Morlaix, avait profondément frappé Coupaïa. Le crucifix en gardait à ses yeux une vertu détournée et singulière, et c’est avec le tremblement de la peur et après s’être signée trois fois qu’elle-même se hasardait à y porter les mains.

Les Puissances, en l’en faisant dépositaire, pouvaient-elles n’avoir pas eu leur dessein ? Elle avait communiqué sa conviction et sa terreur révérentielle à son mari. Pour lui comme pour elle, le crucifix était à la fois une redoutable icone domestique et un talisman souverain contre les embûches de l’ombre, les assauts de l’impiété : malheur à qui l’approchait en état de péché mortel ! Déjà tout frémissant du sacrilège de Thomassin, les hurlements, l’appel désespéré de Coupaïa résonnèrent comme un tocsin de guerre dans cette tête malade et travaillée de rancune. Thomassin, qui tournait le dos à son frère, ne pouvait observer ses mouvements. Il continuait de ne voir que Coupaïa. La misérable, son cri expiré, avait fermé les yeux, et elle aussi peut-être, à cet instant suprême, connut la grande, la déchirante épreuve de tous les mystiques ; elle eut, la ténébreuse, sa sueur du Jardin des Olives : pourquoi ses saints, ses