Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/148

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saintes l’avaient-ils abandonnée, comment avaient-ils pu permettre que ce crucifix, sa sauvegarde, son palladium, au lieu de foudroyer l’impie, comme sur le bateau pirate, devînt la massue dont il allait la broyer ? Si un miracle avait été dans les intentions du ciel, il se fût déjà opéré. « In manus tuas… » murmura Coupaïa. Et tout semblait consommé en effet, quand, dans la seconde même où le vent de la mort fonçait sur elle, Thomassin plia comme un arc tendu à force et lâcha le crucifix,

Coupaïa rouvrit les yeux… Dieu de justice ! Son ennemi, les jarrets cassés, se débattait en face d’elle sous la pression de deux mains furieuses qui s’étaient nouées par derrière autour de son cou et le serraient à l’étrangler !

Placé comme l’était Thomassin, aucune résistance n’était possible. Vainement ses doigts essayèrent de dénouer l’implacable étreinte ; vainement il rua des reins et des pieds : l’étreinte où s’exaspérait toute la sauvagerie d’une âme fanatique et jalouse et fouettée encore par l’eau-de-vie, ne fit que se resserrer. Les yeux de Thomassin jaillirent de l’orbite, sa bouche se tordit, et, tandis que Coupaïa, relevée d’un bond, tendait à deux bras vers lui le terrible