Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/167

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édifice, rasé jusqu’en ses fondements, que le pan de mur et le rentrant de maçonnerie dont je vous ai parlé ; l’autel fut acquis par un antiquaire de la région qui le revendit plus tard à Ambroise Thomas et, quant à la statue du Justicier, on la transporta dans l’église paroissiale.

Pénitence un peu rude, mais nécessaire. L’abbé Kerlo respirait. Comment supposer que, dans cette église de construction récente, sous ces voûtes sans mystère et l’étroite surveillance du clergé local, la terrible icone ferait encore des siennes ? Mais le fait est que les pèlerinages nocturnes à saint Yves-de-Vérité continuèrent comme devant. Les Bretons – et surtout les Bretonnes – ne sont point gens qui se laissent arrêter par de misérables contingences. Au lieu de pèleriner à l’intérieur de l’ossuaire, on pèlerina sur son emplacement, et le reste de la cérémonie, l’offrande du cierge et l’adjuration, se firent à la muette, au nez du clergé, dans l’église même de Trédarzec.

La femme G… le savait. On l’a peinte comme une débile. Quelle erreur ! Marguerite, dans sa jeunesse, s’était destinée au cloître ; un témoin prétend même qu’elle fit son noviciat. Relativement instruite, orgueilleuse, volontaire, très supérieure à son mari qu’elle menait tambour battant et à qui elle avait communiqué sa haine pour Philippe, c’était une de ces mystiques dévoyées, comme il en est tant par le monde, qui font servir la religion à leurs intérêts et mettent Dieu de moitié dans leurs horribles calculs. Elle connaissait la spécialité ou, comme on dit en Bre-