Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/72

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et plus tôt que tu ne t’y serais attendu.

De fait, dès la veille même, il avait écrit à l’entrepreneur qu’il refusait de céder sa terre à moins de trente-cinq mille francs. Il insistait sur le chiffre et marquait sa volonté expresse de n’en rien rabattre. « À bon entendeur, salut ! »

La grève découvrait peu à peu et il put franchir à pied la chaussée de Morvic. La maison des Salaün dormait encore. Sa misère perçait dès l’extérieur, d’où le plâtre de l’enseigne était tombé par endroits et qu’une porte branlante et tout artisonnée ne défendait plus contre le vent. Il souleva le loquet et entra.

L’intérieur était divisé en deux pièces, l’une pour les clients, meublée à l’aventure de tables et de barriques ; l’autre, plus petite, plus sombre, qui servait de cuisine et de dortoir. Point de plancher. Le long du mur, une vieille huche de noyer, un lit-clos, dont les rideaux s’effilochaient par les intervalles du balustre, quelques escabeaux, une table, des bancs, un rouet, et, près de la fenêtre, la caisse d’une horloge. Triste intérieur rendu plus triste encore par la sordidité de ses hôtes. La vie y allait à l’abandon. Des bouteilles cassées gisaient dans les coins pêle-mêle avec des ustensiles de mé-