XVI. Incontinent aprés que le Saint eut esté mis en terre, Dieu opera plusieurs grands miracles à son Sepulchre, & les Bretons Vennetois commencerent à ressentir la perte de leur S. Pasteur ; car une cruelle famine envahit le pays, laquelle, en trois années qu’elle dura, étrangla une innombrable multitude de personnes ; on fait des prieres & Processions publiques & solemnelles pour appaiser l’ire de Dieu ; enfin, on s’avise que saint Patern avoit quitté la ville & Diocese de Vannes, sans y avoir laissé sa sainte Benediction. Là dessus le conseil se tint, & députa-t’on un honorable compagnie pour aller en France querir le saint Corps ; on y alla, mais comme on voulut le lever sur le branquart, il devint si lourd & pesant, qu’on ne le pouvoit seulement lever de terre. Cela attrista grandement tous les assistans, jusqu’à ce qu’un Bourgeois de Vannes s’avança parmy les autres & dist : « Messieurs, nostre saint Prélat défunt m’a autres fois souvent demandé un lieu & métairie que j’ay és Faux-bourgs de nostre Ville, pour y édifier une Église, dont je l’ay toûjours refusé ; mais je luy promets, devant Dieu, ses saintes Reliques & toute la compagnie, que, s’il luy plaist se laisser emporter en sa Ville & la nostre, non seulement je luy donneray ce lieu, mais de plus y feray bastir une Église à mes propres coûts & dépens. »
XVII. À peine eut-il achevé ce propos, que le S. Corps devint leger à merveille dont toute l’assistance remercia Dieu ; ils le leverent sur une littiere richement parée & l’emporterent en grande pompe & solemnité en Bretagne. Les Evesque, Clergé, Noblesse, Bourgeois & toute la populace de Vannes sortit bien loin hors la ville au-devant des reliques de leur saint Prélat, lesquelles furent déposées en ce lieu que le Bourgeois avoit donné au Saint, où, dans peu de temps, fut édifiée une belle Église, laquelle fut dediée en l’honneur de saint Patern, & est une des Paroisses de la Ville de Vannes, où demeura le Corps de saint Patern, jusques à l’an de salut 878. que, pour crainte des Barbares, Normands & Danois, qui, ayant mis pied à terre en Bretagne, ravageoient tout le pays, il fut transporté, avec le Corps de saint Corentin, au Monastere de Marmoûtiers lés Tours[1], où ils ont esté reveremment gardez, & Dieu y a operé de grands miracles par leurs merites & intercessions.
Cette Vie a esté par nous recueillie des anciens Breviaires de Leon, Vannes et Cornoüaille, le 16. Avril ; des anciens Legendaires de Leon, Nantes et Treguer, Robert Coenalis de re Gallica, liv. 2, perioch. 6 ; d’Argentré, en son hist. liv. 1 ; ch. 10 ; les Annales de Bret. de Bouchard, liv. 2, feuil. 56 ; Du Pas, au rôlle des Evesq. de Vannes, à la fin de soit hist. geneal. des illustres Maisons de Bret. ; Robert, en sa Gallia Christiana ; Chenu, en son hist. Chronolog. des Evesques de France, en ceux de Vannes ; Charron, en son Catalogue des Evesques de Nantes ; le Proprium Sanctorum de Vannes.
Cette Vie a esté par nous recueillie des anciens Breviaires de Léon, Vennes et Cornouaille, le 16. Avril ; des anciens Legendaires de Zeon, Nantes et r/’ef/Her, Robert Cofna/H de re
Gallica, liv. 2, perioch. 6 ; d’Argentré, en son 7 ! liv. 1, c7t. 10 ; les Annales de Bret. deBoHcnard, liv. 2, feuil. 56 ; Du Pas, au rôlle des Evesq. de Vennes, ci la fin de son hist.
{/euea/. des illustres Maisons de Bret. Robert, en sa Gallia Christiana Chenu, en son hist.
Chronolog. des Evesques de France, en ceux de Vennes ; Charron, en son Catalogue des
Evesques de Nantes le Proprium Sanctorum de Vennes.
ANNOTATIONS.
LE PREMIER ËVËQUE DE VANNES (A.-M. T.).
E lecteur aura peut-être remarqué que la Vie précédente commence par ces mots « Saint Patern, II. du nom. » À l’époque d’Albert Le Grand on n’en était pas encore cependant à faire d’un seul saint deux ou trois personnalités différentes les théories ingénieuses qui distinguaient de saint Denis ~t’ëo-a-tfe, saint Denis de PctWs, de sainte Marie Magdeleine, la femme pécheresse de l’Évangile, ne devaient prendre corps qu’un peu plus tard, et cependant
- ↑ Comme on le verra dans les Annotations, ceci manque d’exactitude. A.-M. T.