LES VIES DES SAINTS
DONT LES FESTES
ESCHEENT AU MOIS DE JUIN.
LA VIE DE SAINT RONAN.
Saint RONAN estoit Hybernois de nation, de Parens de mediocre fortune & Idolatres, lesquels, soigneux de son avancement, l’envoyèrent aux écolles, où il profita si bien, qu’il devint, en peu de temps, fort docte és sciences prophanes mais Dieu, luy ayant fait connoistre la superstition du Paganisme,
luy fit naistre dans l’Ame un ardent désir de chercher la vraye Religion. À cette fin, il passa en l’Isle de la Grande Bretagne, où, ayant conversé parmy les Chrétiens & s’estant enquis de leur Religion, il reconneut que c’estoit l’unique, laquelle conduisoit au salut éternel, & se résolut de l’embrasser, se fit Cathcchiser & receut le S. Baptesme, &, depuis, s’adonna du tout à l’Oraison & lectures des Saintes Escritures, lesquelles, pour la pluspart, il aprit par cœur. Ayant fait penitence de ses péchez passez, il résolut de se faire d’Église ; &, ayant receu, en leur temps, les Ordres Mineures, de Sous-Diacre & Diacre, il mérita, par sa vertu & bonne vie, de parvenir au Sacerdoce[1].
II. Mais, considerant ce que dit Nostre Seigneur que a quiconque ne renonce à tout ce qu’il posséde ne peut estre son Disciple, » il suivit ce conseil Evangelique, quittant tout, pour l’amour de celuy qui luy avoit tout donné, monta sur mer & aborda heureusement à la coste de Léon, en la Bretagne Armorique, où, ayant trouvé un lieu désert & inhabité, il s’y arresta & bastit un petit Hermitage, résolut d’y passer ses jours en Penitence, Jeusnes & Oraisons. Il pensoit estre en ce lieu si bien caché, que personne ne le connoistroit que Dieu, seul témoin de sa Sainteté, mais il en arriva tout autrement. Car quelques pauvres malades estans, de cas fortuit, ou plûtost par speciale providence de Dieu, venus à son Hermitage chercher l’aumône, le Saint, pauvre volontaire pour Jésus-
- ↑ Et même à l’épiscopat, comme il est dit plus loin dans une annotation. Outre l’avis de dom Lobineau nous avons pour nous fixer sur ce point la Vie de saint Ronan écrite au XIe siècle, d’après des documents anciens ; elle porte pour titre « Vie du saint et vénérable Pontife Ronan » et dans le texte l’auteur dit « Par la grâce de Dieu Ronan est élevé au trône pontifical. » Aussi la liturgie et l’iconographie font invariablement de lui un évêque. – A.-M. T.