Page:Le Grand Albert - La Vie des Saints.djvu/310

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VIE DE SAINTE 271 elle passeit son temps /k faire des oux. rages -k l’6guille, ou -k quelque autre honneste occupation, fuyant l’oysivet6, cronroe mere & nontrice de tous vices. IV. La renomm6e de sa rare beaut6 & autres dons de nature, dent elle estoit dofi6e, la tlt rechercher par le ills ain6 d’un Roytelet d’Escosse, lequel vint voit son pere, accompagn6 des plus grands Seigneurs de sa Cour& la luy demands. Brokan la fit venir en Cour, &, ayant pris l’avis des Seigneurs de son Estat, penchoir h l’accorder ce Prince; mais il voulut, avant d’engagcr sa parole, savoir la volout6 de sa fille. I1 la tira t part en une chambre, &, luy ayant declar6 son intention touchant ce mariage & represent combien le party luy estoit avantageux & l’utilit6 qui en reviendroit tous ses sujets, la conjura d’y prester son consentement. La sainte Fille, prevenu de l’Amour de Jesus-Christ, se troubla de ces paroles, &, ayant quelque peu pens6 a part soy, r6pondit en route humilit6 & modestie:

« Mon Pere, je ne doute aucnernenl du Prince qui me recherche, ny de l’honneur que vestre Maison recevroit de son alliance, non plus dtt profit & utilitd qtti potrroil resulter de ce raariale pour les deux Provinces; rnais ]e ne puis me resettire d faasser la foj qne fay promise it Jesus-Christ, men doux Espotx, & de postposer ses chastes embrasserneas i l’arnor d’art hornrue terrierr & mortel : en tn mot [rnon Pete] j’aj fait vru de n’avoir jurnais autre Espottx qtte nestre Seisneur Jesus-Christ, & ne croy pus qtte le terns qae je fais de ce Prince aleire oftenset l’obei’ssance qne je vets dois, e dtarcl au roerite & qttalitd de celrnj de l’urnour &tqtel je suis puissarnment prdvenu& > V. Brokhan s’attrista extren6ment de cette resolution de sa lille & envoys sa femme Menedux vers clle, pour iascher a la redtire a xolont6; mais elle demeura ferme en sa resolution & ne pot estre fl6chie, ny par les prieres, ny par les lannes, ny m6me par Ies menaces de ses pete et mere, lesquels, vaincus de sa constance, congedierent ce Seigneur & pennirent fi leur Fille de ivre asa volout6. La salute Princesse, ayant courageusement surmont l’ennemy qui luy a;’oit dress6 eerie partie, en rendit graces / Dieu, & d61ors s’adonna entier6nent a son service. Peu de temps apr6s, a seavoit, Fan 434, saint Getmain, Evesque d’Auxerre, qui aveit pass6 en la grande Bretagne pour centrecarter les errcurs des Pclagiens, artira t la flour du Boy Brokhan & y demeura quelqnes mois, preschant d’un zele admirable h son peuple (1): la salute Princesse Nennok ne perdoit aucune de ses Predications, par les roeyens desquelles elle rut tellement embraz6e en l’Amour de Dieu, specialemcnt par le recit que saint Getmain luy ft de la salute vie que menoient les Vierges sanctimoniales de la Bretagne Armorique (2) & autres Provinces des Gaules, qu’elle resolut de sortir de son Pais, passer la Mer & se rendre Religieuse parmy el!es. La difficult estoit d’obtenir le cong6 de ses Pete & Mere, tesquels, pour rich, ne pouvoient suporter son absence; neanmoins, Dieu fa�orisant son dessein, luy fit naitre nne occasion de l’obtenir: car le Roy son Pere, ayant pr6par un banquet somptueux, le premier jour de Jan�ier, jour de sa naissance, il conxqa les Evesques, Princes & Seigneurs de son Royaurae, & par m6me saint Getmain, lesquels estans assis fi table, la sainte Princesse Nennok, prenant son temps, se �6tit de ses beaux accoustremens, &, entrant en la sale du banquet, rayit toute l’assistance en admiration de sa rare beauté ; elle se jetta a genoux aux pieds de son Pete & le pria, les Iarmcs aux yeux, qu’en consideration de la compagnie, il luy voulfist octroyer une requeste; son Pere, qui l’ainoit tendrement, la televa & luy promit de luy accorder

(1) . do [a Borderle voit dans l’dvbque qui rdussit h fidchit la resistance de litechun, non point l’illustre smut Germain d’Auxerre, mais un pieux 6vgque irlandals. -- A.-M. T.

(2) En effet, saint Germain d’Auxerre connaissait la Bretagne, mais il n’avait pu y voir beaucoup de Vierges sanctimoniales, et la gloire de sainte Ninnoc est précisément d’avoir fond le premier monastère connu, pour des religieuses dans notre Armorique. A.-L T.