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LA VIE DE SAINT GOBRIEN,

Evesque de Vennes, Con fesseur, le 16. de Novembre.

aint Gobrien estoit Breton Armoricain, né de parens illustres, qui furent soigneux de le faire étudier, pour l’avancer és charges et dignitez de la République ; mais, ayant achevé son cours de philosophie, il leur déclara qu’il vouloit se faire Prestre ; &, de leur consentement, il estudia en Theologie, sous un Docte Religieux de S. Benoist, qui vivoit dans l’Abbaye de saint Gildas de Rhuys, ne s’adonnant avec moins de ferveur à l’estude de la perfection Chrestienne que des Lettres à quoy il estoit excité par le bon exemple des Religieux parmy lesquels il conversoit. Ses estudes achevées, il prit les Ordres, & ayant chanté Messe, ses parens le pourveurent d’un Canonicat en l’Église de Vennes, dont il distribuoit le revenu aux pauvres, se réservant ce qui luy estoit necessaire pour vivre fort mediocrement. Il disoit la Messe avec une grande ferveur & devotion, & y versoit quantité de larmes il estoit decemment vêtu, &, sous ses habits, il portoit un aspre Cilice sur la chair nuë ; jeûnoit souvent, prioit continuellement, & vivoit dans la ville autant recueilly & retiré, que s’il eust esté dans le fond de quelque désert, ne paroissant en public, que lorsque l’heure de l’Office l’obligeoit d’aller au Chœur, ou que la charité et assistance du prochain luy faisoient interrompre ses Religieux exercices.

II. Il avoit vécu huit ans en son Canonicat, lorsque Morvan (c’est Maurice), Evesque de Vennes, vingt-troisiéme en Ordre, deceda l’an 700, duquel les obseques ayans esté faites, les électeurs, assemblez pour élire un nouveau Prélat, jettèrent les yeux sur nôtre S. Gobrien, &, ne jugeans aucun plus digne d’occuper «e Siége que luy, le nommèrent leur Evesque, &, quelques excuses & raisons qu’il pût alleguer pour s’exempter de cette dignité, ils l’envoyèrent devers Genevius II. du nom, Archevesque de Dol, qui le consacra, en l’Église de S. Samson, au grand contentement de tout le peuple. Il couroit alors une maladie estrange parmy le peuple, que les Medecins nommoient le feu sacré, à laquelle on ne trouvoit point de remède (1) ; il se trouva nombre de ces malades à la consecration de nôtre saint Prélat, qui les guerit par sa benediction ; ce qu’ayant esté divulgué par le pays, il se rendit un si grand nombre de ces malades à Dol, pour recevoir la même faveur, que le Saint fut prié de se retirer, crainte qu’ils n’infectassent la Ville. Il fut receu de son peuple avec un extrême contentement, lequel il gouverna jusqu’à l’an 87. de son âge, qu’ennuyé de sa charge, il s’en démit & resigna son Evêché à un vertueux Personnage, nommé Diles ; &, ayant pris congé du nouvel Evesque & de son Clergé & du peuple, il se retira en un lieu désert, sur le rivage de la riviere Aouste où il vécut jusqu’à l’an 762., que sentant sa fin approcher, il manda l’Evêque & les Chanoines, &, ayant fait ouvrir son Tombeau à côté droit de l’Autel de son Hermitage, il receut les Sacremens de l’Eucharistie & Extréme-Onction, & rendit son Ame à son Createur. Il fut solemnellement enterré en ce sien Hermitage, où Dieu a operé de grands miracles en témoignage de sa Sainteté ; car les Aveugles y ont esté illuminez, les sourds y ont recû l’ouye, les muets la parole, les possédez du demon y ont esté délivrez, les paralytiques gueris, les fébricitans & autres malades délivrez de leurs infirmitez, par les mérites de ce S. Prélat, à l’honneur & gloire de celuy qui se montre glorieux en ses Saints. (1) Paris fut délivré de cette maladie en l’an 1130 par les mérites et l’intercession de S." Genevieuve, à laquelle on bastit une Esglise en mémoire de cela, et s’appelle Sainte Genevieuve des Ardents. A.