Page:Le Koran (traduction de Kazimirski).djvu/567

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  sur mahomet. xxix

l’habitude de les teindre, en noir, selon l’usage des Arabes, de se colorer les ongles avec le henna, et de mettre du collyre (kohl) sur ses paupières ; il aimait à se mirer dans un miroir ou dans un vase rempli d’eau pour ajuster son turban. Quant à ses goûts, on cite de lui ces paroles : « Les choses que j’aime le plus au monde, ce sont les femmes et les parfums, mais ce qui me réconforte l’âme, c’est la prière. » Son extérieur avantageux était du reste rehaussé par une grande expression de bonté et d’affabilité. Il ne quittait jamais le premier celui qui l’abordait, et ne retirait pas la main avant que celui qui la lui serrait n’eut retiré la sienne ; il s’adresse dans le chapitre LXXX un reproche sévère pour avoir reçu avec humeur un homme pauvre, toutefois il eut soin de se prémunir contre les importunités et la grossièreté de ses concitoyens, par des passages du Koran qui enseignent les règles de la politesse. Préoccupé avant tout du but principal, il savait supporter avec patience les injures et les insultes et n’éprouvait aucun plaisir à satisfaire sa vengeance personnelle, lorsque le succès de sa cause la rendait inutile. Après la prise de la Mecque, on lui amena un de ses ennemis les plus acharnés, il garda le silence et finit par lui pardonner. « J’ai gardé le silence, dit-il à ses compagnons, dans l’attente que quelqu’un se levât et tuât cet homme. — Nous attendions un signe de toi, prophète ! — Il ne sied pas au prophète de faire des signes d’intelligence qui seraient une trahison, répondit-il. » C’était en quelque sorte enseigner comment on devait interpréter le silence du prophète vis-à-vis d’un ennemi. La tradition a conservé plusieurs traits de la vie de Mahomet qui le peignent comme un homme très-doux, très-humain, très-bienveillant pour ceux qui lui étaient dévoués. Il ressentait cependant vivement les satires de quelques poètes idolâtres, et chargea quelques-uns de ceux qui avaient embrassé son parti de leur répondre ; les plus renommés de ces poètes dévoués à Mahomet sont Hassan, fils de Thabit, et Ca’b, fils de Zohaïr. Quant à lui-même, il était tellement étranger à la poésie, qu’on cite de lui des exemples, où, en répétant les vers d’un autre poète, il transposait les mots de manière à détruire et la mesure et la rime. Le jugement qu’il porte, dans le Koran, sur les poètes en général (chap. XXVI), font croire qu’il était tout aussi disposé à s’en passer, dans son empire musulman, que Platon l’était à les chasser de sa république. Il faut reconnaître en même temps que l’exaltation religieuse produite par l’entraînement du nouveau culte a comprimé tout à coup les élans poétiques du paganisme. Un célèbre poète arabe, Lebid, cessa de composer des vers dès qu’il fut devenu musulman, et les poètes panégyristes de Mahomet ne peuvent lutter avec les Amrilkaïs, les Chanfara, les Tarafa.

Il est difficile de dire si Mahomet savait lire et écrire ; le passage du Koran où l’ange Gabriel lui dit : « Lis. — Et sa réponse : Et que lirai-je ? » ferait croire qu’il savait lire ; quand peu de