Page:Le Mierre-Oeuvres-1810.djvu/229

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Mes voeux, mes souvenirs, une image trop chère, [350]

L'hymen qui m'enchaîna, le noeud qui m'était dû,

Et ce que j'ai souffert, et ce que j'ai perdu ;

Pour celui que j'aimais, lorsque je n'ai pu vivre,

C'est un autre au tombeau qu'en ce jour je vais suivre :

Je meurs, c'est peu, je meurs dans un affreux tourment, [355]

Pour rejoindre l'époux qui m'ôta mon amant.

Fatime

Ah ! Que m'apprenez-vous ?

La Veuve

J'en ai trop dit, Fatime.

Excuse, époux cruel, excuse ta victime :

Ce coeur toujours soumis, quoique tyrannisé,

Suit l'étrange devoir par ta mort imposé, [360]

Je ne balance point à mourir sur ta cendre,

N'exige point de moi de sentiment plus tendre.

Si tu fis mes malheurs, qu'il te suffise, hélas !

Que je te sois fidèle au-delà du trépas :

Je t'ai fait de ma vie un premier sacrifice, [365]

Qui de ma mort peut-être égale le supplice :

J'ai pendant mon hymen dévoré mes ennuis,

Et la plainte est permise à l'état où je suis.

Fatime

Après un tel hymen, quel étrange partage !

La Veuve

Si tu m'aimes encor, laisse-moi mon courage, [370]

J'en ai besoin, Fatime, et n'ai plus d'autre bien.

Mais ne révèle point ce funeste entretien :

Ah ! J'atteste le ciel, que j'aurais avec joie