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hobo d’occasion

livres, les revues, seules retenaient longtemps ses regards les cartes géographiques et les images de locomotives. Les gares furent toujours les plus beaux buts de promenade. Depuis qu’il est libre d’aller seul où il veut aller, elles le sont encore. Et depuis qu’étudiant en génie civil il dispose de longues vacances et peut s’en servir à son gré, c’est aussi à travailler sur les chemins de fer qu’il s’est employé. Il a une première année vécu ses trois mois d’été à l’extrémité ouest de l’Ontario, et dormant, mangeant dans des wagons… Avec le laissez-passer auquel il avait droit, il s’en fut visiter Port-Arthur et les autres postes importants du grand lac, mais admirant et observant avant tout le poème que représentait pour lui la voie ferrée longeant des falaises ou des plages.

À la fin de septembre il revint chez lui heureux comme s’il avait passé son été au paradis, lui qui s’était pourtant levé tous les matins à cinq heures et avait travaillé de ses mains à de durs ouvrages.

Quand ses secondes vacances vinrent, il choisit un emploi à peu près identique, qui comporterait aussi la vie dans un wagon, mais stationné beaucoup plus loin : à l’autre bout de la Saskatchewan.

Tranquillement, tout son pays allait ainsi lui entrer dans le cœur. Car il partit avec la farouche résolution de se rendre au cours de la saison jusqu’à Vancouver.

Pendant les deux longues nuits du premier trajet, il garda l’œil ouvert pour ne rien manquer. Il fut surpris de trouver les prairies de l’Ouest moins monotones qu’il ne s’y attendait, avec les bosquets, les touffes d’arbustes qui assez souvent