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enthousiasme

tentaient bravement de vaincre l’horizon trop plat. Bien que son train n’y arrêtât qu’une vingtaine de minutes, il se fit une opinion sur Régina et Moose Jaw, une impression assez favorable.

Et maintenant, il était à son poste, à Swift Current. Il y arriva à deux heures du matin. Cela lui sembla une petite ville à peu près grande comme Saint-Hyacinthe, une ville avec deux théâtres, cinq ou six restaurants, trois hôtels… Une ville sise entre deux ondulations de terrain, de sorte que la chaleur semblait s’y renfermer comme dans une serre.

Malgré sa fatigue, il commença tout de suite son travail. Et il le commença dans l’air brûlant des prairies en juillet. Il le continua un mois durant, d’abord.

La chaleur était de plus en plus accablante ; Louis aurait manqué d’enthousiasme s’il n’avait pas caressé, pour s’encourager à la tâche, son cher projet d’aller voir l’Ouest jusqu’au bout. Et puis, il partageait la camaraderie agréable de trois jeunes gens étudiants comme lui en génie civil, et avec qui il pouvait échanger des opinions sur les sujets les plus divers. Eux venaient de Saskatoon. L’autre homme de leur équipe était un russe ukrainien, dans notre pays depuis 1929, et qui leur parlait du régime de là-bas et des nouvelles plus ou moins gaies qu’il recevait de ses parents. Jamais plus, disait-il, après avoir connu la vie au Canada, il ne voudrait retourner en Russie. Devant la table bien garnie du train où mangeait l’équipe, il racontait la misère, la famine de là-bas.