Page:Le Normand - Enthousiasme, 1947.djvu/35

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
33
mousseline

n’avait pas rencontré son menuisier qui, entendant l’histoire, s’offrit à venir soulager Mousseline.

Mousseline donna trois pintes. Marie dut ensuite, toujours sans avoir mangé, aller reconduire au village, l’âme charitable qui l’avait aidée.

La pluie continua, torrentielle ; Mousseline beugla, et la journée se passa. Non dans l’oisiveté, cependant, pour Marie et ses invitées. Revêtant leurs imperméables, chaussant des bottes, quatre ou cinq fois elles s’en furent cueillir des brassées de fourrage pour les offrir à Mousseline. Le plan de vie de cette bête, n’ayant pas d’abord comporté l’internement, la grange n’était pas pourvue de ce qu’il fallait pour la nourrir.

La journée passa et l’heure de la seconde traite arriva.

Une dernière épreuve fit pour Marie déborder la coupe. Retourner au village chercher quelqu’un serait ridicule. Elle avait décidé qu’elle trairait elle-même Mousseline. Après tout, elle n’était pas plus sotte qu’une autre.

Elle entra donc dans l’étable avec son seau et tout le tremblement. Elle n’avait jamais touché à un pis, de sa vie ! Mais elle avait vu faire les autres, et en prenant le thé, d’ailleurs, quelques instants plus tôt, chacun lui avait donné son bon conseil. Il fallait tirer comme ceci, comme cela, paraît-il ; il fallait surtout bien égoutter…, etc…

Mais Marie réussirait, Marie n’aurait pas de mal, car si Mousseline s’était attachée à quelqu’un dans ces quelques jours, c’était sûrement à Marie, qui lui avait prodigué tant d’attentions, fait tant de beaux discours et de caresses, pour la convaincre