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AUX PHLOX
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II

La petite sacristine

Par hasard, la grande sacristine étant absente, c’est Esther qui ce matin la remplace. Esther, neuf ans, pas beaucoup plus haute qu’une botte, délicate, fine, gracieuse. La messe vient de finir dans la chapelle minuscule, que la lumière du matin envahit, les hautes fenêtres s’ouvrant sur de grands morceaux de ciel bleu découpés et fleuris du feuillage des sapins sombres. C’est calme ; on entend bourdonner au dehors les mouches que la chaleur réjouit. Esther s’est levée et est entrée bravement dans le chœur, pendant que les plus vieux achevaient leur action de grâces. Esther est évidemment ravie de la mission qu’elle a enfin obtenue. Hier soir, parce qu’on refusait de lui permettre d’allumer les lampions, elle pleurait. Ce matin, elle triomphe.

Elle va et met d’abord l’Évangile dans son étui. Elle agit avec sagesse, lentement, le visage aussi grave que possible. Mais un visage d’enfant est un beau livre ouvert. Elle bat des paupières, s’efforce de voiler la lueur qui scintille dans ses si grands yeux bruns ; l’éclair luit quand même, et au coup d’œil furtif qu’elle jette sur les assistants, on reconnaît qu’elle est heureuse