Page:Le Normand - La Maison aux phlox, 1941.djvu/156

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
[156]
LA MAISON

çaient à heurter la porte à six heures, six heures et demie… Ils nous éveillaient et ils étaient fort mal reçus. Alors, nous avons cloué cette belle affiche :

« Défense de frapper avant sept heures et demie. »

Depuis, lorsque nous sortons au réveil, pour notre premier bain de mer, nous trouvons notre petit homme sagement assis sur les marches du perron, notre petit homme et son gallon de bleuets.

Le voyant ainsi chaque jour, nous apprenons peu à peu son histoire. Sa tante l’élève. Il n’a ni père, ni mère. Il s’appelle Israël. Il vend des fruits pour avoir les moyens de s’habiller et d’aller à l’école.

Nous avons par hasard regardé ses pieds. Ils sortaient, minces et nus, de vieux souliers de tennis, trois fois trop grands ; des souliers dont seules subsistaient les semelles tenues par l’empiècement des lacets, empiècement attaché d’une corde.

Les chaussures que nous mettons parfois pour descendre à la mer, traînaient sur la véranda. Une petite paire n’était vieille que parce qu’elle était démodée et sans boutons. Nous la lui avons essayée. Elle faisait. Israël est parti ravi.

Hier, pour nous récompenser, il est arrivé souriant de toutes ses dents, fortes et blanches ;