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AUX PHLOX
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Alors, soudain, le bois devint magique. La terre sentait bon et les sapins mouillés exhalaient un arôme puissant comme un parfum. L’heure fuyait, les jeunes filles avançaient toujours, attirées irrésistiblement par la profondeur verte de la forêt, la forêt silencieuse, recueillie, déserte et qui devenait mystérieuse à mesure que les arbres grandissaient, se resserraient.

Et c’est ainsi que, surprises, elles arrivèrent au pays des champignons. Elles aperçurent d’abord de fausses oronges, isolées, et puis tout à coup, le bois fut enchanté. Sous tous les rameaux étalés bas, — où coulait et s’étendait une étonnante lumière, — le monde des champignons surgit ; un monde jaune, rouge, rose, un monde violet, blanc, orangé, grisâtre, couleur de fumée, couleur de soleil, couleur de fruits !

Trois par trois, d’énormes bolets sur leur pied gonflé arboraient un chapeau charnu et rond, brunâtre et gluant ; et, près des énormes bolets, de tout petits perçaient la mousse de leur tête où collaient encore des aiguilles d’épinettes ; des lycoperdons neigeux, brillaient ; d’inquiétantes russules semblaient vouloir se mêler à des familles qui ne les aimaient pas. Des chapeaux étaient ronds, ou s’ouvraient en parasols, ou se creusaient en entonnoirs, ou déformés se rompaient ; celui des hydnes sinués ou pieds de mouton…