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AUX PHLOX
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Le sol du sous-bois tour à tour s’élevait et s’abaissait légèrement ; et les champignons aux chapeaux de soleil étaient sur ces minuscules collines comme sur un amphithéâtre, pendant que d’autres, au fond de l’arène paraissaient jouer une scène. Puis, les jeunes filles aperçurent sur une butte des touffes de monotropes qui se cachaient près d’un tronc. Jamais la ressemblance de cette fleur fantôme ne les avait tant frappées. Les tiges minces, longues, blafardes, un peu de noir à la tête, représentaient bien une phalange de revenants lilliputiens, qui, ayant peur d’être vus des vivants, droits, élancés, se serraient dans leur suaire lumineux, argenté ; suaire pâle, qui noircit si on le touche, mais qui brillait d’un indescriptible éclat, dans l’étrange jour du sous-bois.

— Le soir, se dirent presque tout bas les jeunes filles, cette forêt sûrement doit s’animer. On doit y entendre des voix, à l’abri des rameaux de tant d’arbres de Noël parfaits…

Car cette forêt était de sapins sans défauts ; quelques-uns poussés deux ou trois ensemble, formaient un seul arbre magnifique, aux branches bien symétriques descendant de la pointe fine dessinée sur le ciel, jusqu’au sol où elles protégeaient comme un toit, le peuple magique des champignons et des fleurs fantômes.