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AUX PHLOX
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découvre a thing of beauty. La disposition de ces iris, leur couleur, celle du vase qui les contient, leur réflexion dans la glace, n’est-ce pas une joie ? Les yeux sont ravis, l’âme touchée et reconnaissante. L’intellectuelle Monique jongle un long moment avec ces idées. Elle aime bien s’écouter penser.

Après les premières années trop remplies qui se sont écoulées depuis son mariage, Monique vient seulement de se ressaisir. Devenir épouse, devenir mère, vous transforme tellement que d’abord vous ne retrouvez ; presque rien en vous de la jeune fille que vous étiez ; auparavant. Aussi, se ressaisissant enfin, Monique apprécie-t-elle la vie comme jamais autrefois elle n’avait su l’apprécier. Jeune fille, elle désirait trop de choses. Elle espérait mers et mondes. Les plus belles poésies lui semblaient intégralement vraies. Sa jeunesse, elle la croyait la porte ouvrant sur une félicité unique, qu’on lui devait. C’était une fatigante course au bonheur, à un bonheur qui reculait toujours.

Aujourd’hui le bonheur est plus simple. Il a rétréci et elle n’en souffre pas trop. Elle commence à pouvoir prendre de la vie une mesure plus exacte ; à en envisager plus froidement les déceptions. Elle se console en espérant voir ressusciter, plus tard, dans l’éternité en préparation, ses beaux rêves parfaits.