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LA MAISON

six heures. Chacun se taisait pour ne pas effrayer l’autre. Les pires choses allaient arriver.

Sentant venir mes larmes et cherchant pour les répandre un endroit solitaire, j’entrai dans le grand salon, mais son obscurité me fit peur. Du pouce, j’allumai la lumière, et je poussai un grand cri de joie qui ne l’éveilla même pas, elle, ma sœur, tant elle reprenait consciencieusement sa nuit manquée !

Sur le grand sofa de noyer sculpté, sur la fraîcheur du crin, dans sa petite robe bleue, ses bas courts chiffonnés, rabattus sur ses souliers, Marie rêvait à un cirque bien plus beau que le réel et ne se décidait pas à s’éveiller.

Elle avait dormi là, en paix, depuis le dîner. Elle veilla tard ce soir-là, héroïne heureuse d’un conte terriblement triste qu’elle n’avait pas vécu.