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Page:Le Nouveau chatouilleur des dames, 1880.djvu/21

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XIII

Où sont-ils donc, les jours des cultes orgiaques,
Où l’homme s’enivrant de sa virilité,
Sculptait sur les phallus l’orbe des zodiaques,

Et pour axe du Cosmos donnait la volupté ?
 
On Savait pas encore inventé la morale,

La vertu n’avait pas encor châtié l’amour ;
Le mythe rayonnant en sa splendeur astrale,
Des baisers de la nuit faisait naître le jour.

Le Sage dont l’esprit plane au-dessus des préjugés routiniers de la foule imbécile sait trop que morale et vertu ne sont qu’affaire de milieu, de convention, de climat, de tempérament, d’occasion et presque de nourriture. Un homme vigoureux qui a eu dix maîtresses peut être plus vertueux et l’est d’ordinaire davantage que son voisin l’anémique qui n’en a jamais connu. Le poids de la vertu est plus difficile à supporter à une jolie femme qu’à une laide, à une mondaine qu’à une recluse, à une saine qu’à une rachitique, à une intelligente qu’à une sotte. Les vertueux au sang batracien qui ne trouvent rien de plus doux dans la vie que de se chauffer à l’aurore boréale de ce qu’ils appellent les bonnes mœurs, capitonnés dans l’édredon des convenances sociales, n’empêcheront jamais les natures plus ardentes de chercher de plus chauds soleils. Il est des estomacs qui ne peuvent s’accommoder des fades mets, il leur faut du piment, et du piment ils prennent. Sont-ils moins honnêtes ?