Page:Le Parnasse contemporain, I.djvu/18

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


LA CONQUE


Oh ! qui dira jamais, conque fine et nacrée,
Dans combien d’océans, pendant combien d’hivers,
Tu supportas, au choc enflammé des éclairs,
L’assaut tumultueux de la haute marée !

Maintenant, sous le ciel, parmi les fucus verts,
Tu t’es fait un doux lit dans l’arène dorée.
Mais ton espoir est vain. Longue et désespérée,
En toi pleure à jamais la voix sombre des mers.

Mon âme est devenue une prison sonore.
Et comme dans ton sein roule et soupire encore
Un regret affaibli de la grande clameur ;

Ainsi, du plus profond de ce cœur trop plein d’Elle,
Triste, lente, insensible, et pourtant éternelle,
Toujours monte une étrange et confuse rumeur.




ARTÉMIS


L’âcre senteur des bois montant de toutes parts,
Chasseresse, a gonflé ta narine élargie,
Et dans ta virginale et virile énergie,
Rejetant tes cheveux en arrière, tu pars !

Et tout le jour tu fais retentir Ortygie
Du rugissement fou des rauques léopards,
Et bondis à travers la haletante orgie
Des grands chiens éventrés dans l’herbe rouge épars.