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LE DRAME DE RACHEL



I



Elle est morte ; — une énigme enveloppe sa vie ; —
Oublieuse de gloire et d’or inassouvie,
Morte en sa puberté.
Et qu’un jour l’Avenir l’accuse ou la défende,
Cette mort, — cette vie, — est comme une légende
Pour la Postérité.

Il semblait qu’un vertige eût entraîné sa pente.
Un cœur d’homme animait cette frêle charpente
Faite pour un oiseau.
Son public la suivait comme un dogue à la chaîne.
Elle eût, de son regard, ployé le front d’un chêne,
Elle, mince roseau.

Jeune fille, d’un souffle, elle émouvait le globe.
Elle est morte ; elle enterre en un pli de sa robe
Les élans des grands jours.
Dieu nous avait donné cette dernière étoile ;
Et le Poëte pleure, emportés dans son voile,
Le beau, l’art, ses amours.