Page:Le Parnasse contemporain, I.djvu/26

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Sur ces lèvres sans voix éclate un rire amer.
Ils m’entraînent, parmi la ronce et les décombres,
Très-loin, par un ciel lourd et terne de l’hiver.

Trois spectres familiers hantent mes heures sombres.


II


Ces spectres ! on dirait en vérité des morts,
Tant leur face est livide et leurs mains sont glacées.
Ils vivent cependant : ce sont mes trois remords.

Que ne puis-je tarir le flot de mes pensées,
Et dans l’abîme noir et vengeur de l’oubli
Noyer le souvenir des ivresses passées !

J’ai brûlé les parfums dont vous m’aviez empli,
Le flambeau s’est éteint sur l’autel en ruines,
Tout, fumée et poussière, est bien enseveli.

Rien ne renaîtra plus de tant de fleurs divines,
Car du rosier céleste, hélas ! sans trop d’efforts,
Vous avez bu la sève et tranché les racines.

Ces spectres ! on dirait en vérité des morts !