Page:Le Parnasse contemporain, I.djvu/279

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C’est l’heure flamboyante, où, par les hautes herbes,
Bondissant au milieu des molosses superbes,
Dans les clameurs de mort, le sang et les abois,

Faisant voler les traits de la corde tendue,
Les cheveux dénoués, haletante, éperdue,
Invincible, Artémis épouvante les bois !


JOSÉ MARIA DE HEREDIA.




L’ECCLESIASTE


L’Ecclésiaste a dit : Un chien vivant vaut mieux
Qu’un lion mort. Hormis, certes, manger et boire,
Tout n’est qu’ombre et fumée. Et le monde est très-vieux,
Et le néant de vivre emplit la tombe noire.

Par les antiques nuits, à la face des cieux,
Du sommet de sa tour, comme d’un promontoire,
Dans le silence, au loin, laissant planer ses yeux,
Sombre, tel il songeait sur son siége d’ivoire.

Vieil amant du soleil, qui gémissais ainsi,
L’irrévocable mort est un mensonge aussi ;
Heureux qui d’un seul bond s’engloutirait en elle !

Moi, toujours, à jamais, j’écoute, épouvanté,
Dans l’ivresse et l’horreur de l’immortalité,
Le long rugissement de la vie éternelle.


LECONTE DE LISLE