Page:Le Parnasse contemporain, III.djvu/11

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Après les heures de l’étude,
Nous revenions à nos ébats,
Et toi, non sans inquiétude,
Tu suivais, tricotant nos bas.

Chacun volait à sa chimère,
Tu n’en perdais aucun de l’œil,
Ayant les soucis de la mère
Sans en avoir le doux orgueil.

De nos douleurs et de nos joies,
Dès lors tu pris toujours ta part ;
Mais sous le joug où tu te ploies,
Tu la pris toujours à l’écart.

Tu contenais, à chaque épreuve,
Ton cœur muet, quoique trop plein ;
Avec la veuve tu fus veuve,
Orpheline avec l’orphelin.

Quand la maison dépareillée
Vit quelquefois entrer la mort,
Ce fut toi qui dans la veillée
Restas près de celui qui dort.

De ce passé tu survis seule,
O vieille femme en cheveux blancs,
Vénérable comme une aïeule
Pleine de souvenirs tremblants !