Page:Le Parnasse contemporain, III.djvu/205

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AU JARDIN


Cinq heures. — Je me lève et je passe au jardin.
O fraîcheur, ô silence, ô minute d’Éden !
O solitude, ô paix ! l’aurore vient de naître.
Nul voisin ne se montre encore à sa fenêtre !
Le soleil, aux rayons à peine réveillés,
Éclabousse de feux les feuillages mouillés.
Tout est charmant et pur ! et mon regard se pose,
Candide et réjoui, sur une jeune rose
Ingénue et piquante, et qui de loin me tend
Ses lèvres de carmin ouvertes à l’instant.
Vif comme un chant d’oiseau, du fond de sa corolle
Un parfum délicat quand j’approche s’envole,
Et je suis tout confus, par hasard matinal,
D’en recevoir soudain l’hommage virginal ;
Je me sens trop payé de mon modeste zèle,
Je rougis, et je dis : « Pardon, mademoiselle… »