Page:Le Parnasse contemporain, III.djvu/232

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Dans la fange du siècle à qui l’enfer est dû ?
Est-ce l’horrible soif des voluptés charnelles
Qui chauffait votre gorge et troublait vos prunelles ?
Jusqu’au dégoût final êtes-vous abreuvé ?
Que cherchiez-vous au monde et qu’avez-vous trouvé ?
Rien. Honteux, affamé, chargé d’ignominie,
Vous haletez autour de notre paix bénie
Comme un mort effrayant qui cherche son cercueil.
Mais l’expiation rigide est sur le seuil.
Désormais, dussiez-vous trépasser centenaire,
Il faut payer le prix de ce qui régénère,
Et, face à face avec l’horreur de son péché,
Vivre en sa tombe avant d’y demeurer couché.
Ne le saviez-vous point ? Qui méprise la règle
N’est qu’un oison piteux qui tente d’être un aigle.
La paupière cousue, il va par monts et vaux,
Culbutant d’heure en heure en des piéges nouveaux,
Jusqu’à ce qu’il trébuche au bord de la Géhenne
Où sont les grincements de dents, les cris de haine
Et la flamme vorace où cuisent les maudits.
Mon frère, sachez-le, vraiment, je vous le dis :
Mieux vaut le fouet qui mord, mieux vaut l’âpre cilice,
Quand la béatitude est au bout du supplice,
Que la chair satisfaite et pour le Diable à point.
Malheur à qui Jésus sanglant ne suffit point !
Malheur à qui, brisant le joug divin, oublie
Que penser est blasphème et vouloir est folie ;
Car les siècles s’en vont irréparablement
Et l’éternité s’ouvre après le jugement.