Page:Le Parnasse contemporain, III.djvu/335

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Lui n’aimer pas la France ! Osez-vous bien le dire,
Alors qu’il est le seul peut-être et le dernier,
Qui de son air natal se nourrisse et s’inspire,
Et qui retrouve encore un peu de ce sourire,
Hélas ! que deux cents ans n’ont pu faire oublier.

Et tandis que, fuyant les rives maternelles,
D’autres cherchaient au loin quelque sentier nouveau,
Lui, trouvait dans les fleurs ces sources naturelles,
Où de nos grands aïeux les Muses immortelles
Puisaient en se jouant tous les secrets du Beau.

Oh ! comme ils sont troublés par sa grâce ingénue !
Quelle triste amertume impossible à cacher !
Comme ils souffrent au fond ces traîneurs de massue
De voir si lestement s’élancer vers la nue
Toutes ces flèches d’or d’un immortel archer.

Ils ne pardonnent pas sa libre raillerie,
Surtout sa clairvoyance et sa douce fierté,
Sa main qui sans pitié touche à la draperie,
Et cet instinct natal de la vieille patrie,
Son invincible horreur pour la solennité.

C’est léger, disent-ils, la main sur son volume ;
Oh ! léger ! quelle gloire ! — Amis, soyons légers,
Légers comme le feu, les ailes et la plume,
Comme tout ce qui monte et tout ce qui parfume,
Comme l’âme des fleurs dans les bois d’orangers.