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d’aînesse se substitua peu à peu au droit, de tester que les Franks avaient d’abord emprunté aux familles-souches rurales du Nord et du Midi (§ 9), lorsqu’ils eurent compris la nécessité des familles stables[1].

L’enchevêtrement des droits et des devoirs du régime féodal créa entre les familles rurales de tout rang, comme entre les membres de chacune d’elles, des liens qui n’ont encore été complètement brisés ni par les abus du droit d’aînesse, ni par les désordres de l’ancien régime, ni par les violences de la révolution. Malgré le contact des cours corrompues du XVIIIe siècle, plusieurs grandes maisons conservèrent jusqu’à la révolu-

  1. La pression qui fut exercée par les suzerains sur les propriétaires de fiefs est encore visible aujourd’hui dans la constitution britannique. Les lords qui, depuis trois siècles, en ce qui touche la transmission de leurs biens, ont repris la féconde coutume du testament conservée de tout temps par les petits propriétaires (§ 12), sont encore soumis au droit d’aînesse en ce qui touche la transmission de leur siège à la chambre haute. Malgré les vœux qui ont été souvent exprimés à titre individuel, les pouvoirs publics ont toujours refusé de subordonner cette dernière transmission à la volonté paternelle. Les pairs d’Angleterre sont contraints de laisser leur siège à leur fils aîné ; mais ils ont le droit de transmettre par testament leurs biens à tout autre héritier.
    C’est sous l’inspiration des mêmes sentiments que la Constitution française de 1832 n’a accordé qu’à titre d’exception et pour une fois seulement au souverain le droit de choisir son héritier. La Constitution de 1870 confirme ces dispositions. Elle porte dans son article 3 : « Napoléon III, s’il n’a pas d’enfant mâle, peut adopter les enfants et descendants légitimes dans la ligne masculine des frères de l’empereur Napoléon Ier… L’adoption est interdite aux successeurs de Napoléon III et à leur descendance. »