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celui qui, par son passé comme par l’organisation présente de la famille, de la religion et de la propriété, offre les meilleurs symptômes d’une haute destinée. Établis dès 1534 dans le bassin du Saint-Laurent, les émigrants des familles-souches de la Normandie s’y affermirent, malgré les calamités déchaînées sur eux par les désordres de la métropole (§ 15), par l’antagonisme local des races européennes ou indigènes et par les rigueurs du climat. Mais après des combats héroïques ils durent subir le honteux abandon du gouvernement de Louis XV, et se soumettre à la domination anglaise. Persécutés d’abord par les jalousies de race et par l’intolérance religieuse des nouveaux gouvernants, ils profitèrent à la fin des libertés que la monarchie britannique accorda peu à peu à toutes ses colonies, et depuis lors ils ont vu croître rapidement leur prospérité. Le nombre des Franco-Canadiens, réduit à 65,000 à l’époque de la perte du Canada, en 1763, s’est élevé, en 1868, à 1,200,000. On a calculé que, en dehors d’une faible immigration, la population a constamment doublé pendant chaque période de vingt-cinq ans, par le seul effet de la fécondité des anciens colons et de leurs descendants. L’évêque catholique de Québec, qui en 1763 suffisait au gouvernement religieux des vastes territoires compris entre les bassins du Saint-Lau-