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contribuer, autant qu’il dépend d’eux, au bonheur des individus moins libéralement doués par la nature. Dans les sociétés qui s’agglomèrent et se compliquent pour subvenir à la demande croissante du pain quotidien, il devient donc chaque jour plus difficile de conjurer les inconvénients de la richesse, de la science et de la force, c’est-à-dire des produits légitimes des inégalités naturelles. Heureusement, comme je le constaterai plus loin, l’observation méthodique des faits révèle dans ces mêmes sociétés des forces toutes nouvelles pour réprimer, au sein des générations naissantes, les tendances innées qui les portent à violer la loi morale.

Dans les deux derniers âges, en effet, certaines sociétés ont résolu ce double problème : elles ont concilié les traditions de la loi morale avec les nouveautés du pain quotidien. La famille stable a continué son œuvre principale, la répression du vice originel chez ses enfants. La société a secondé cette œuvre en développant peu à peu certaines institutions qui n’étaient qu’en germe dans l’âge des herbes, et qui ont conjuré les inconvénients qu’aurait pu amener l’agglomération progressive des familles. Ces institutions se rattachent à trois catégories qui, bien que distinctes, sont néanmoins liées entre elles par des rapports intimes, et qui, dans leur ensemble, ont formé à tous les âges la Constitution essentielle