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raineté. Comme à toutes les époques de discorde, chaque parti offrait d’ailleurs deux nuances : les hommes de paix voulaient respecter à tout prix les deux principes, mais ils avaient le désir d’en réformer les abus. Les hommes de violence se proposaient de remédier d’abord à l’abus des principes ; et ils ne craignaient pas de les affaiblir en les critiquant.

Malheureusement la corruption grandissait, et, au milieu des passions déchaînées, les pacifiques n’eurent pas le pouvoir d’accomplir la réforme. Ceux d’entre eux qui étaient mêlés aux affaires publiques furent réduits à l’inaction : ne voulant point participer aux abus, ils durent, comme le fit Montaigne, se renfermer dans la vie privée. Peu à peu, les violents prirent la direction du mouvement social : le contraste des aspirations devint un antagonisme déclaré ; puis, des déclarations de doctrine, on arriva aux actes. Dix-huit ans après l’impulsion première imprimée par Luther aux Allemands, les partisans français de la réforme commencèrent la rupture en adhérant au programme tracé par Calvin (1535). Ils manifestèrent ensuite plus formellement cette rupture lorsque, l’Église de Genève ayant été fondée (1543), ils instituèrent d’autres églises pour y pratiquer le nouveau culte. Le contact des cultes rivaux accéléra le mouvement qui poussait les esprits aux actes de violence : le