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Ces forces ont été progressivement affaiblies par la plupart des gouvernants qui se sont succédé depuis 1661. Sous le régime de la monarchie en décadence, cette œuvre de destruction est opérée par l’influence de trois faits principaux. La riche noblesse de la province, entassée, pendant un siècle, dans les combles et les entresols de Versailles, a perdu, loin de ses résidences, l’esprit de patronage qui l’unissait aux populations rurales ; elle s’est imprégnée des mauvaises mœurs qu’elle avait sous les yeux, à son tour, elle a corrompu les jeunes souverains et le personnel de leur parenté qui avaient été élevés sous les meilleures influences des dignitaires ecclésiastiques, choisis par les gouvernants dans la parenté de cette noblesse de cour, et privés depuis 1685 du contrôle naturel qu’exerce partout le rapprochement de deux cultes, défaillirent peu à peu et abaissèrent le niveau de la corruption jusqu’à la riche bourgeoisie des villes. Les gouvernants enfin, guidés par les légistes, achevèrent, par l’emploi de manœuvres captieuses[1], l’envahissement des anciennes libertés provinciales et locales.

  1. En 1662 Colbert, ayant augmenté sans ménagement les impôts indirects, provoqua une révolte des paysans dans le Boulonnais. Il profita de cette circonstance pour supprimer les anciennes franchises de la province. Il envoya sur les lieux le sieur de Machault, maître des requêtes, pour faire une enquête qui put justifier cette mesure. Il lui écrivit à cette occasion : « Il est d’une, très grande