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Page:Le Présent, année 1, tome 1, numéros 1 à 11, juillet à septembre 1857.djvu/369

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POÉSIE.

Et, — sombre exception, — comme certain traité
Des docteurs de l’Église ou de la Faculté,
Il proclame très-haut, par sa seule cocarde,
Que le monde avec lui doit se tenir en garde,
Et qu’enfin, sa légende horrible, il ne la dit
Qu’au philosophe-artiste, au penseur-érudit.


Les livres ont leur cercle assigné. — L’Evangile
Est pour tous les humains ; pour bon nombre, Virgile r
Juvénal, pour plusieurs ; d’autres, pour quelques-uns.
Tous remèdes à tous ne sont pas opportuns.
Et faut-il, pour cela, supprimer les dictâmes
Qui ne s’adresseraient qu’à vingt corps ou vingt âmes ?
Et puis, les Fleurs du Mal, quel mal en craindrait-on ?
Leur langage est le vers… qui donne peu le ton :
C’est un préservatif… un mur inaccessible,
Et la contagion, en vers, n’est pas possible,
À moins qu’on ne les chante, — et ce n’est point le cas, —
Ou que des imprudents et des trop délicats
Ne dénoncent la chose aux sots qu’ils électrisent,
Et, voulant la punir, ne la popularisent.
D’ailleurs, l’art est un voile, et c’est un fait connu
Que toute poésie est chaste dans son nu.


Bien plus, il est des temps, à traîner sur la claie,
Dont aucun baume, hélas ! ne peut sécher la plaie ;
Il faut donc la sonder à toute profondeur,
Et, pour seul antidote, étaler sa hideur.
— Vous connaissez ce père, à bout de remontrances
Auprès d’un jeune fils, froid et sourd à ses transes,
Qu’appelait la débauche en son gouffre béant.
Las de voir ses conseils, son exemple à néant,
Le père, à l’hôpital des impudiques femmes,
Un jour, mena son fils, et sur les lits infâmes
Lui montrant la torture et l’horreur de la chair :
« Crois-tu que leurs plaisirs soient payés assez cher ? »
Et de là, sous le toit des hommes, leurs complices,