line, Arsène ayant désiré de la voir habillée de blanc. Le lendemain, elle avait à peine achevé sa toilette neuve, qu’elle aperçut à l’entrée du jardin maître François, qui, pour ne pas perdre de temps, examinait d’abord le potager. Le valet était au comble de ses vœux ; il avait toujours rêvé d’entrer à la Maison-Grise, afin d’y voir au moins une fois par ses propres yeux ; et jamais l’occasion ne l’avait aussi pleinement favorisé. Il s’avança donc avec un air de respect asséz douteux vers la jeune femme ; car, pourquoi la saluer plus bas qu’il n’en était besoin, puisqu’il n’avait aucune foi dans son étoile ? Julie, d’ailleurs, le laissa là sans lui répondre, lorsqu’elle eut entendu qu’Arsène ne la verrait pas de toute la journée. Elle rentra dans la maison. Pour lui, il demeurait effrontément, observant toutes choses et avançant d’un pas à chaque observation, lorsque arriva madame André. Julie reparut presque en même temps ; elle avait remis sa robe noire. Le valet la regarda plus attentivement, et, de bonne foi, il la trouva laide. Et puis la maison était si mesquine ! Il se promit bien de faire part de ses impressions à son maître. Mais Julie le suivit jusqu’au bout du jardin.
— Où est-il allé ? demanda-t-elle.
Il répondit : À Bayeux !
Arsène approchait des lieux marqués par la fortune. Dès en entrant dans le bois, il aperçut deux ombres qui glissaient au détour du premier sentier, et il entendit deux voix de femmes. Il pressa le pas : Anna avait aussi une robe blanche ! Et sa compagne ? À sa riche stature, le bel Onfray l’aurait reconnue entre mille : c’était madame Éléonore. Anna avait donc besoin d’une gardienne.
Il s’arrêta pour se consulter un peu. Aborder la châtelaine en présence d’un témoin aussi redoutable que la mairesse, c’eût été s’exposer à tout. Ah ! si madame du Songeux avait été seule !… Et qu’aurait-il pu lui dire ?… Tout à coup, il se souvint de la dernière impertinence de François : « Monsieur ne saurait aller là que pour se faire voir… », et il y reconnut un bon conseil. Il prit donc le parti de demeurer sur la lisière de la chênaie. Il ne savait point qu’à ce moment Anna se mourait de dépit au bras de la mairesse !… Au risque d’être vue, elle se retourna enfin à un nouveau coude du sentier… Arsène venait de le quitter pour se remettre en faction sur la route.
— Il n’a pas osé venir, murmura-t-elle.