ment que vous y restiez. Il n’appartient qu’à vous d’y tenir la première place, si nous perdions M. Dupleix. » Ce nom était d’un augure malheureux pour La Bourdonnais. Il resta. Ses espérances de gloire, l’ambition la plus honorable, sa confiance en lui même, sa bravoure, son mérite incontesté, tout le retint, afin que sa fortune heurtât une destinée supérieure et fût brisée.
II
La retraite de Nadir-Çah et l’état de désorganisation dans lequel il avait laissé l’empire n’investissaient pas uniquement les çubahs d’une portion d’autorité enlevée au Grand Mongol. Le pouvoir indépendant qu’ils avaient ambitionné et que la faiblesse du maître leur concédait, devint bientôt pour eux une lourde charge. Ces liens féodaux, qu’ils avaient brisés pour leur propre compte, il s’agissait de les resserrer à l’égard des nababs, chefs des provinces, sous peine de ne plus jouer à leur tour qu’un rôle inerte, analogue à celui de l’empereur, mais dénué de tout prestige extérieur. De leur côté, les nababs eux-mêmes, une fois échappés au joug des çubahs, disposant de ressources moindres encore, par suite de l’extrême morcellement de leur pouvoir, devaient redouter l’intervention inévitable et les empiétements progressif des comptoirs européens. Bien que la conquête musulmane fût dès lors un fait accepté, la diversité des idées religieuses et des mœurs, d’une part, et, d’autre part, l’aversion instinctive qui persiste, à toute époque et en tout lieu, entre la race dominatrice et la race soumise, étaient des raisons naturelles de penser que les populations hindoues contribueraient plutôt, par leur abstention même, au démembrement de la puissance mongole. Il y avait là, sans nul doute, la logique et la force des choses aidant, un résultat acquis pour l’avenir. Dupleix l’avait prévu et l’eût atteint, au profit de la civilisation, pour la France et par elle. L’ancienne monarchie et les marchands dont il dépendait ne le permirent pas. Son action en ce sens fut, du reste, entravée et retardée par des complications inattendues.
Dès son arrivée à Pondichéry, il s’était hâté d’exposer nettement au contrôleur général et à la Compagnie la situation des affaires dans