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Page:Le Présent - Tome deuxième, 1857.djvu/496

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LE PRÉSENT.

Messieurs, la pièce que nous avons eu l’honneur de représenter devant vous, est de M. Léon Gozlan, auteur des Nuits du père La Chaise, du Notaire de Chantilly, ex-courriériste de la Presse.

Rattachons-nous bien vite à cette corde que nous tend le hasard. Et nous aussi nous sommes courriériste, bien obscur, bien humble, mais l’humilité n’y fait rien, il faut noircir ses douze pages. Ah ! je préférerais bien, d’honneur, suivre l’exemple de M. Nestor Roqueplan et abandonner la chronique ! pour présider à l’Opéra-Comique et diriger la vertu de ces dames. Vous savez depuis huit jours qu’il remplace M. Perrin. Puisse-t-il y faire fortune, et n’être jamais plus forcé d’écrire dans le rez-de-chaussée des journaux !

Quelles nouvelles ! l’ouverture des chasses à Compiègne. Je n’y ai point été invité ; je n’y suis pas même allé comme voyageur. Toutefois, Compiègne doit être Si agité, si beau, si brillant à cette heure, que je pourrais bien m’y cacher huit jours. Alors vous auriez des nouvelles. Je me les ferais conter par un centgardes et j’ajouterais l’orthographe.

C’est avant tout dans l’Aisne qu’il faudrait aller, à la cour d’assises de Laon, en face de ce troupeau d’assassins. Lemaire et Villet, quelles figures ! Je voudrais les voir tous les deux, s’agitant dans la mort, se crachant le sang au visage, le sang des autres — des assassins, des lâches ! « Je tuais parce que j’étais le plus fort ! » dit Lemaire. Ah ! ils n’inspirent que l’horreur, le dégoût, la pitié. Comparez ces misérables aux condamnés d’Oran. J’ai donc vu exaucer ma prière On a commué leur peine. Ils sont tous vivants, et ils auront le temps de se repentir ou de pardonner.

Les voilà toutes en vingt lignes, les nouvelles ! je ne veux pas parler de cette querelle misérable suscitée à un homme de lettres par un bottier manqué. Si tous les directeurs de journaux ressemblaient à ce pauvre diable, il faudrait faire avpc ces juifs comme Pluton avec les poëtes, les chasser de la république des lettres, et leur coller un écriteau sur le dos. Mais tout cela est trop petit, trop mesquin, et trop vil, pour qu’on doive en parler encore.

Si le temps me servait ! si je ne m’étais pis laissé entraîner par Froissard à Meudon, au café, à l’église, je pourrais m’arrêter quelque temps à la Bourse, passer devant la Banque de France, et écouter les rumeurs sinistres ! Je préfère attendre zdans quinze jours la situation se sera dessinée. Nous saurons ce que devient la crise américaine, les agents de la Banque auront tenu conseil, la Bourse aura parlé : crise fatale, question grave ! Là est toute la France. Où donc ai-je lu cette phrase : « Devant l’homme de bourse, hommes d’États, de lettres, ou de guerre baissent leur plume et leur épée ? Il a coulé trop d’encre et coulé trop de sang. Sur le carnet de l’agent de change se dessine en chiffres sûrs la figure émue de la nation, et l’argent pèse plus que le fer dans la balance de l’avenir. » Max.