pourtant, dont M. de Vallée aime à citer la probité glorieuse, d’Aguesseau, fort bien jugé par lui pour un esprit élevé, un écrivain pur, mais sans originalité ni hauteur, eut la suprême habileté, parce qu’il demeura droit dans un temps corrompu. Il eut d’ailleurs raison contre le système — parce que le système tomba.
Je doute que le livre de M. Oscar de Vallée ait raison à son tour contre ceux dont il a voulu faire les successeurs de Law. Le mal, si c’est un mal toutefois, car cette réserve est inévitable, le mal est grand. Mais si la question brûle, pourquoi tourner autour de la flamme et ne pas y jeter hardiment le flot de colère qui pourrait l’éteindre ? Pourquoi ne point aborder de face l’ennemi, qui n’est guère troublé ? pourquoi ne point livrer l’assaut au présent et chercher pour le combattre de vieilles armes dans le passé ? — Quatorze chapitres d’allusions historiques, deux à peine d’allusions directes, voilà le livre. M. Oscar de Vallée est habile à remuer les témoignages de toutes les époques : là, c’étaient les mémoires secrets de ce terrible Duclos, les mépris écrasants de Saint-Simon qu’il faisait revivre, ici… ici le croirait-on ? c’est une comédie de M. Ponsard. M. de Vallée pouvait choisir une massue moins lohrde et plus meurtrière, et je veux croire qu’il avait à son service d’autres arguments. Citer, déduire, cela ne suffit plus ; il faut prouver, il faut combattre. Le livre est grave, nous le répétons, il a eu du retentissement et de l’importance ; mais il y avait autre chose à faire, et ce n’est pas là l’œuvre attendue. En France il n’est qu’un levier contre les abus, qu’un remède efficace contre la sottise, c’est le pamphlet. Qui nous rendra Paul Louis Courrier pour une heure ? Contre l’imbécillité publique, contre ces hideurs privées qui la nourrissent ce qu’il nous faut, c’est un coup de fouet sanglant, terrible ; hélas ! qui le donnera ?
L’Allemand de fantaisie, auquel on a cru si longtemps en France, n’est point du tout celui dont le roman de Doit et Avoir nous raconte les aspirations et les qualités. L’Allemand vrai est en général un peu inerte, candide à moitié, et s’il n’a pas même cette moitié-là, il n’en est pas plus coupable, car ses petites fourberies sont toujours naïves. C’est ainsi qu’il s’exagère à lui-même cette propension à la rêverie si fort moquée chez nous, et souvent, lorsqu’il croit rêver, l’Allemand digère. Cependant il est bien certain quela poésie est le besoin le plus impérieux de ces bonnes gens d’outre-Rhin, qui ne sont pas toujours bons. Aucune poésie n’est plus véritablement ni plus profondément nationale que la leur, et certes, ils ont sur nous cet avantage de ne pas aimer.seulement leurs poëtes, mais encore de les comprendre. Il y a peu d’ignorance en Allemagne, il n’y a point de sottise
- ↑ Librairie Hachette, 14. rue Pierrc-Sarrazin.