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Dans la filature, le métier renvideur (self acting mule) fut inventé et appliqué à Manchester, parce que les fileurs se refusaient à travailler aussi longtemps qu’auparavant.

En Amérique, la machine envahit toutes les branches de la production agricole, depuis la fabrication du beurre jusqu’au sarclage des blés : pourquoi ? Parce que l’Américain, libre et paresseux, aimerait mieux mille morts que la vie bovine du paysan français.

Le labourage, si pénible en notre glorieuse France, si riche en courbatures, est, dans l’Ouest américain, un agréable passe-temps au grand air que l’on prend assis, enfumant sa pipe.

Autre passage de ce livre intéressant :

La grande expérience anglaise est là, l’expérience de quelques capitalistes intelligents est là : elles démontrent irréfutablement que, pour puissancier la productivité humaine, il faut réduire les heures de travail et multiplier les jours de paye et de fêtes…

Que les prolétaires d’aujourd’hui, exténués par un travail de huit, dix, douze heures, aient sans cesse peur d’en manquer et en demandent toujours davantage, voilà ce que la postérité ne comprendra pas.

Alors que des fortunes colossales se réalisent en quelques années, ceux-là même qui les ont produites vont finir lamentablement dans quelque hôpital.

Ne vaudrait-il pas mieux que les prolétaires anglais et français refusassent obstinément le travail, comme ceux d’Espagne, qui, en somme, trouvent à vivre, que de se condamner aux travaux forcés pour en arriver à mourir de faim ?

Pour réagir contre une surproduction sans mesure, entraînant les chômages qui, de plus en plus, fauchent les malheureux par milliers, il faut en arriver à couper la journée ordinaire en deux.

Comme le dit encore Lafargue :

… Pour avoir du travail pour tous, il faut le rationner comme l’eau sur un navire en détresse.

Les ouvriers des différentes nations doivent exiger législativement, sinon révolutionnairement, de la part des aimables détrousseurs qu’ils ont encore la naïveté d’envoyer aux Chambres au lieu de les mettre au mur, une loi internationale fixant la journée de travail à cinq heures — autrement dit trente heures par semaine — avec une base de salaire suffisamment rémunératrice.

Dans le même ordre d’idées, qu’ils n’oublient pas de réagir encore contre le marchandage, le travail