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pital, auquel ils servent de moyens de défense, ne sont que la résultante des larmes et du sang des prolétaires..

Ces derniers, que sont-ils ? Chair à machine pour le créer, chair à mitraille pour le défendre !

Avez-vous vu partir pour la bataille un régiment bien équipé, aux armes luisantes, et dont les hommes marchent gaîment, en bon ordre, pleins d’entrain, de force et d’espérance ? Il suffit de quelques heures pour transformer cette troupe en un amas confus de fuyards éperdus, déchirés, le visage noirci, traînant des membres brisés, poussant des cris de douleur, et n’offrant plus que le spectacle d’un lamentable désarroi.

Parcourez ces villages en ruines, regardez ces chaumières en feu, contemplez ces champs dévastés et couverts de cadavres, et dites-nous, chauvins imbéciles, si les guerres, les guerres de conquêtes,ne sont pas les plus monstrueux des crimes.

Un seul genre de guerre, en notre époque encore barbare, est légitime : c’est la guerre du travailleur contre le capitaliste, de l’opprimé contre l’oppresseur : la guerre sociale.

Comme disaient nos pères de 93, « l’insurrection est le plus sacré des devoirs. »

Elle éclatera périodiquement tant que les écrasés de la féodalité nouvelle n’auront pas réalisé leur idéal de Justice.

Les travailleurs soulevés obtiennent plus en un jour de victoire qu’en cinquante ans de lutte pacifique.

La guerre de conquêtes entrave leur essor vers l’Égalité ; la guerre sociale ou civile leur ouvre les portes de l’Avenir.

Toute la science des gouvernants consiste à déchaîner celle-là pour éviter celle-ci.

Arrière donc les rêveurs de combats, les chauvins à la Déroulède, les patriotes enragés et bêtes ! Assez de batailles fratricides entre peuples ! Guerre à la guerre ! Une muselière aux revanchards !

L’ennemi n’est pas au delà des frontières, il est ici même : c’est le riche, c’est l’oisif, celui qui n’a que la peine de naître et de se vautrer dans les jouissances, tandis que le pauvre, le producteur,