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Page:Le Roy - La Revanche du prolétariat, 1885.djvu/32

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condamné à un labeur sans trêve, voit s’éteindre sa triste existence dans le dénuement et le désespoir.

Sous le fallacieux prétexte de défendre « la patrie, » le sol, dont la plupart des plébéiens ne possèdent pas une parcelle, on ne nous arme en réalité que pour défendre les prérogatives d’une minorité infime.

Si, las de nous voir broyer sous la meule possédante, nous réclamons un adoucissement à nos douleurs, on lâche sur nous les troupes de police et l’armée prétorienne.

Et si par hasard un député, plus honnête ou moins canaille que ses pareils, élève la voix en notre faveur, des démocrates de la Chambre les uns bâillent, les autres se tordent, et l’on passe à l’ordre du jour.

Farce lugubre !

— Mais les Allemands, disent les sycophantes qui nous gouvernent, ne pensent qu’à nous enlever la Champagne et la Bourgogne, après nous avoir ravi l’Alsace et la Lorraine.

Fadaises !

Nos expulseurs de réfugiés ne s’entendent-ils pas avec le roi de Prusse comme larrons en foire ?

Les enfants perdus de notre cause se moquent du suffrage universel comme une poule d’une fourchette, et les travailleurs ne seront pas de si tôt libres s’ils ne recourent à des moyens plus énergiques ; mais les chacals puants de l’agio, et autres punaises de sacristie qui se repaissent de notre sang, ne donneront pas longtemps le change sur le mouvement socialiste en Allemagne.

Malgré le semi-état de siège, deux millions de votards viennent d’envoyer vingt-cinq députés socialistes, nommés sur un programme de classe, au Reichstag allemand : en compte-t-on un seul au Parlement français[1] ?

Et puis aux jours de honte de 1870-71, est-ce que les députés communistes Bebel, Liebknecht et Jacobi n’eurent pas le courage de protester en

  1. Un petit nombre de porte-paroles du Parti ouvrier ont réussi à forcer les portes d’assemblées électives de moindre importance. La sentinelle de la Révolution, Paris, n’en compte encore que deux, siégeant à l’Hôtel-de-Ville : les citoyens Chabert et Vaillant.